Etat de l’art sur la fiabilité



1.Une nouvelle méthode de conception

L’approche fiabiliste est un outil essentiel d'une conception fiable. Selon la qualité de l'information disponible, elle permet d'évaluer la probabilité de
défaillance associée à une méthode de dimensionnement, de justifier ou de calibrer des coefficients partiels de sécurité, de définir des stratégies
d'inspection, maintenance et réparation.

1.1.Introduction


Aborder les questions de fiabilité en mécanique suppose de préciser tout d’abord dans quel contexte se situe l’approche proposée. En effet, la fiabilité recouvre tout à la fois des méthodes largement répandues, comme la mise en œuvre des techniques statistiques du contrôle de fabrication, que de nouvelles méthodes s’intéressant à la défaillance et à l’évaluation du risque. Ces dernières procèdent d’une démarche encore nouvelle dont la philosophie générale doit être située. Nous nous intéressons à des méthodes qui sont développées essentiellement en relation avec la modélisation des matériaux et des structures. Elles font bénéficier la mécanique de bien des acquis de disciplines scientifiques, la théorie des probabilités en premier lieu, et de l’expérience d’autres champs technologiques. Elles s’en différencient par une relation étroite avec les modèles de comportement mécanique. En acceptant une approche par les probabilités, les méthodes de fiabilité en mécanique permettent de calculer des estimateurs de la fiabilité : probabilité notionnelle ou conditionnelle, indice de fiabilité, sensibilité de la défaillance à la description stochastique des données.

1.2. Les limites du calcul déterministe : le facteur de sécurité

Un modèle numérique ne tient pas compte des variations de cotations ou même des variations des caractéristiques des matériaux. Les paramètres d’entrée doivent être des valeurs connues et fixes. L’approche par les méthodes de fiabilité est la seule qui puisse, au niveau du calcul, prendre en compte ces variations.

Les utilisateurs de méthodes de dimensionnement déterministes avaient conscience de l’aspect incertain des propriétés des matériaux. Pour palier cette évaluation faite lors de la prise de dimension ou de la caractérisation, il est nécessaire d’appliquer un coefficient dit de sécurité.

En effet, lors de la production d’une pièce, les cotes ne sont jamais connues de façon sûre. Nous en connaissons une valeur au point de mesure et faisons une moyenne sur l’ensemble de la pièce. Quel que soit le nombre de mesures, il y aura toujours une approximation.

L’incertitude diminuera mais subsistera. Il est à remarquer qu’une autre forme d’erreur est introduite pendant la mesure. Le simple fait de mesurer à l’aide d’un pied à coulisse, par exemple, apporte une imprécision en considérant la surface comme plane sur la zone de contact avec la pièce.

Notre perception des matériaux et des objets n’est qu’une évaluation globale. Un ingénieur utilise habituellement des valeurs caractéristiques généralement obtenues par majoration ou minoration d’une valeur supposée moyenne selon le sens nécessaire pour aller vers la sécurité.

L’application des facteurs de sécurité permet de masquer toutes les différences entre les produits finis et leurs plans. Mais cette méthode de surdimensionnement a ses limites dés qu’il s’agit d’optimiser le poids ou le volume d’une pièce (dans l’aéronautique par exemple).

1.3.Approche fiabiliste : plus prés de la réalité

En acceptant une approche par les probabilités, les méthodes de fiabilité en mécanique permettent de calculer des estimateurs de la fiabilité : probabilité notionnelle ou conditionnelle, indice de fiabilité, sensibilité de la défaillance à la description stochastique des données.

elles proposent un traitement réaliste des incertitudes et une méthode d’évaluation de facteurs de sécurité trop souvent arbitraires ; elles apportent
une aide à la décision conduisant à une conception plus économique et mieux équilibrée ; elles analysent les modes de défaillance et mesurent la fiabilité apportée par l’application des règlements ; elles permettent une répartition optimale des matériaux entre les différents composants d’une structure ; elles peuvent incorporer l’expérience acquise dans la conception par l’actualisation en fonction du retour d’expérience ; elles aident aux décisions de maintenance et de réparation dans un double objectif de sécurité et d’économie ; elles élargissent la maîtrise de la connaissance des incertitudes sur la réponse des structures.

L’analyse d’une défaillance potentielle suppose qu’en conception ,tous les modes de défaillance possibles soient examinés, c’est à dire toutes les relations entre les variables élémentaires, les composants et les systèmes.

Cette analyse préalable est un acte essentiel car la simple identification d’une défaillance potentielle implique la mise en œuvre de dispositions pour minimiser les risques, et cela sans aucun calcul fiabiliste particulier. Il ne sert à rien de consacrer des efforts importants sur une situation bien identifiée si une situation critique est oubliée.

1.4. Mathématiques pour la probabilité

Un produit ou une structure mécanique sont caractérisés par des variables de conception {X}, telles que celles représentant la géométrie (R,e), le matériau (fe), les conditions aux limites, le chargement p et des défauts potentiels comme une fissure (a).

La connaissance a priori (en conception) ou a posteriori (en inspection, maintenance et réparation) ne permet de disposer que d'une information
incertaine, aléatoire, voire floue. Sous certaines conditions, les variables X peuvent être représentées par une densité conjointe de probabilité fX(x).

La modélisation des variables élémentaires nécessite de disposer d’une information toujours insuffisante . En effet, une certaine somme d’information
sur les composants est nécessaire afin de pouvoir calquer une distribution et ainsi modéliser mathématiquement la dispersion.

Un modèle mécanique relie les variables de conception, associant des variables sollicitations et des variables résistances. La performance mécanique est décrite par une fonction de performance G({X}), dont les réalisations positives sont les réalisations de succès, alors que les négatives traduisent des échecs et impliquent une défaillance. Cette fonction, par exemple, compare la résistance maximale du matériaux à la sollicitation :
Résistance maximale du matériaux : R

                Sollicitation : S

                                                                                   G(X)=R-S

Si la résistance est supérieure à la sollicitation (R>S), la fonction G(X) devient positive. Nous atteignons une conditions de succès.
Pour obtenir la probabilité de défaillance, il suffit de calculer Prob(G({X})<0.

G(X) est la fonction de performance associée à une règle de fonctionnement (ici la résistance de la structure doit être supérieure à la sollicitation).
La mesure de la défaillance est alors la probabilité associée à l’événement {R.S = 0}, soit :
probabilité de défaillance = Pf = Prob ({R . S = 0})
La notation avec l’indice f vient du mot anglais failure. Elle représente le scénario de défaillance.
La fonction G(X)=0 définit conventionnellement la surface d’état limite, la fonction d’état limite.